Cassoulet et grosse tempête
Par Sylvie, samedi 31 janvier 2009 à 23:46 :: Voyages :: #47 :: rss
Episode 4
Nous voilà donc de retour sur les sièges inconfortables du Hall 2 de l'aéroport d'Orly-Ouest avec nos nouveaux billets "non valables pour l'embarquement". On sait.
On sait aussi qu'on a peu de chances de monter dans l'avion de 17h50, vu la longueur de la file d'attente. Nous ne sommes pas prioritaires et nous allons découvrir qu'il y a beaucoup plus malheureux que nous.
A peine plongée dans "Le Yoga pour les Paresseuses", j'entends ma voisine de droite parler à sa voisine de droite :
- " Je ne comprends pas comment fonctionnent les réservations et les priorités. Qui part en premier ? Est-ce ceux qui attendent depuis le plus longtemps ? Ou ceux qui sont inscrits les premiers sur la liste d'attente ? On a du mal à avoir des renseignements."
Je ne lève pas le nez de mon bouquin, tout à coup passionnant. D'abord, je ne sais pas non plus comment fonctionnent les listes d'attente et surtout, à partir de maintenant, chacun pour soi... Pas bien, mais bon... Pas envie d'aider quelqu'un à décoller avant moi. Tais-toi et lis "Le yoga pour les Paresseuses" tout en prêtant l'oreille au haut-parleur crachouilleur au cas où il crachouillerait notre nom.
Quand il crachouille, c'est pour annoncer que l'avion de 17h50 est complet et qu'aucune personne inscrite en liste d'attente ne pourra y monter. On s'en doutait. Et aussi que les personnes en liste d'attente sont invitées à se présenter à 18h20 à l'enregistrement C. Donc, à partir de maintenant : ne pas quitter la pendule des yeux. Donc : ne pas papoter avec sa voisine.
- " Excusez-moi, madame, est-ce que vous pourriez me garder mes bagages le temps que j'aille au guichet des réservations." implore ma voisine. Zut.
- " Bien sûr madame, pas de problème " On n'est pas des sauvages quand même... Et depuis le matin, toutes les 30mn, le haut-parleur crachouilleur nous rappelle que tous les bagages non accompagnés seront immédiatement détruits. Ca ne rigole pas à Orly.
Un oeil sur la troisième page du Yoga pour les Paresseuses, un oeil sur les deux énormes valises de la dame, le troisième oeil sur la pendule et les oreilles en alerte à tout message crachouillé par le haut-parleur, je me sens dans la peau d'une poule qui voudrait faire du tricot. Dur, dur.
Après ce qui me semble une éternité à cause de tous mes sens en éveil en même temps, la dame des deux grosses valises revient.
- " J'ai voulu faire une réservation pour un avion ce soir mais il n'y a plus aucune place."
- " Vous attendez depuis quand ?"
- " Ce matin 6h. Quand j'ai appris que mon avion était annulé, on m'a fait une réservation sur l'avion de 13h50. Quand il a été annulé à son tour, on m'a dit qu'on ne prenait pas de réservations tant qu'on ne saurait pas l'heure de réouverture de l'aéroport de Toulouse. Et maintenant qu'il est ouvert, il n'y a plus de place ce soir."
- " Vous êtes inscrite en liste d'attente ?"
- " Oui, je l'ai fait tout à l'heure mais ils ne savent pas comment marchent les priorités, si ce sont les premiers inscrits en liste d'attente ou ceux qui attendent depuis le plus longtemps."
Moi non plus, je ne sais pas mais nous le saurons très vite toutes les deux car, au même moment, peu avant 18h20, mon troisième oeil fixé sur la pendule le confirme, le haut-parleur crachouilleur se met à débiter une liste de noms plus ou moins audibles : "C'est nous !"
- " Au revoir madame ! Vous aurez le prochain avion où nous avions réservé !" Enfin, j'espère.
Course à l'enregistrement C, à l'embarquement "La Navette" salle 30, au contrôle de sécurité, à l'intérieur de l'appareil. Bonjour monsieur le commandant et messieurs dames les hôtesses. Sourire de part et d'autre. Eux, professionnel, nous, de joie.
Ca y est, en un temps record, nous sommes assis aux sièges 30B et 30C. Pas au hublot comme prévu dans l'avion fantôme de 8h45 mais dans un vrai avion qui va décoller pour Toulouse, son soleil et son cassoulet !
Avec tout ça, il est déjà 19h. Peu après, le commandant annonce que le décollage aura un peu de retard, le temps d'embarquer tous les passagers en toute sécurité. Compréhensible, au moins 30 personnes éparpillées dans l'aéroport ou occupées à bouquiner, papoter, dormir, rêvasser, déprimer, appelées brusquement pour embarquer, ça ne se gère pas en 5 minutes.
L'avion est un A321 au lieu de l'A320 prévu le matin. Renseignements pris, le premier contient 30 à 40 personnes de plus que le second. Merci Air-France et tout le personnel d'avoir fait mille efforts tout au long de cette journée pour que se réalise enfin mon rêve : aller manger un cassoulet à Toulouse en avion.
Quatre jeunes enregistrés dans les premiers comme nous en liste d'attente se sont trouvés aussi à l'enregistrement C puis dans l'avion. Ce sont les premiers inscrits en liste d'attente qui partent les premiers. Ce n'est pas juste. La dame de 6h du matin inscrite après nous attend toujours. C'est comme ça chez Air-France. Tout n'est pas parfait.
19h30 : décollage. L'avion roule gentiment sur la piste puis les moteurs se mettent à rugir et hop ! Je vole ! ! !
- " Un sandwich, une boisson, monsieur, madame "
- " Ah que oui ! "
Et une petite bouteille de Merlot chacun pour fêter ça !
En bas, le ciel est parfaitement dégagé. Aucun nuage. On voit comme si on y était les lumières de la nuit, les voitures sur le périphérique, les rues éclairées, les maisons alignées, puis les hameaux, les villages, les petites routes de campagne, la nuit noire de la France profonde, Limoges et son océan de lumières délicates comme sa porcelaine et enfin Toulouse étendue sur des kilomètres de dentelle scintillante.
20h30 : l'A321 se pose en douceur sur la piste de l'aéroport de Toulouse Blagnac.
Antoine, prévenu rapidement de notre départ nous attend aux arrivées depuis une demie-heure. Les parkings sont un peu désorganisés mais l'aéroport est toujours debout.
Encore un petit quart d'heure et nous serons confortablement installés dans le canapé d'Antoine.
Petit contretemps de... onze heures mais tout va bien : le sud-ouest est sinistré mais pas rayé de la carte comme on aurait pu le croire vu d'Orly.
Le lendemain matin, nous nous réveillerons à Toulouse, ville ensoleillée comme elle se doit.
En chemin vers le cassoulet...
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